Issues du manga de Tatsuki Fujimoto et de l'anime du studio MAPPA, les mésaventures amour-horreur du jeune Denji arrivent sur grand écran grâce à Crunchyroll. Notre critique de Chainsaw Man – Le film : L'histoire de Reze.
La plus grande difficulté, lorsqu'on a affaire à une œuvre comme Chainsaw Man – The Film: The Story of Reze, est simplement de s'orienter. Les propositions cinématographiques d'anime sont très souvent le résultat d'une continuité étroite et multimédia entre mangas, séries télévisées et chapitres conçus pour le grand écran : ses protagonistes et les prémisses narratives elles-mêmes (généralement tentaculaires) sont considérées comme allant de soi. Le spectateur occasionnel est consciemment renoncé, pour privilégier un fandom fidèle. C'est tout à fait logique sur le plan commercial, mais c'est aussi dommage : pour le travail que nous faisons, nous savons que nous devons étudier, alors que nous ne sommes pas déjà familiers avec un univers spécifique, mais ceux qui ignorent les coordonnées d'un Chainsaw Man peuvent renoncer à une expérience qu'ils trouveraient peut-être intéressante et satisfaisante. Essayons de nous aider, nous et ces hypothétiques spectateurs occasionnels, en partant du principe que les fans n'auront pas à chercher dans notre texte l'analyse détaillée qu'ils exigent.
Qui est Denji, seize ans, le « Homme à la tronçonneuse » du titre ? C'est un garçon qui, au milieu des années 90, entre dans une réalité alternative, où les diables parcourent les villes, parmi les êtres humains, et sont éliminés par les chasseurs de diables de la sécurité publique : le chef de ce dernier corps, Makima, a pris Denji sous son aile protectrice, dont le cœur a été remplacé par celui du mythique diable à la tronçonneuse, avec qui il chassait les diables pour les yakuza et avec qui il a fusionné après avoir été pratiquement mort. Réalisateur une pratique qui a conduit au succès d'illustres représentants tels que Demon Slayer, récemment champion du monde du box-office avec Le Château de l'Infini, mais les racines sont lointaines.
Cela dit, l'Histoire de Rezé constitue-t-elle à elle seule une expérience cinématographique intéressante ? À notre avis, oui, car la caractérisation des principaux protagonistes est assez claire, avec un crescendo narratif fermé en une heure et quarante minutes, bien qu'évidemment ouvert à une suite. Reste le risque de se perdre dans le dédale des personnages secondaires, mais l'histoire principale est finalement un mélodrame clair sur un amour impossible : adolescent attiré mais effrayé par les filles, Denji est amoureux de son supérieur Makima, mais le délicat Reze, barman à temps partiel, généreux en le comblant de douceur, fait irruption dans sa vie. Cependant, ce mélodrame passe du grotesque à l'horreur, nous vous invitons donc à ne pas tenir pour acquis qu'une idylle va émerger. L'idée d'un amour autodestructeur et sacrificiel est toujours fascinante, surtout quand « l'autodestruction » pour Denji est très relative, étant donné qu'il a un moyen de régénérer son corps, même lorsqu'il est victime de violences d'éclaboussures chorégraphiées ! L'élément mélancolique, dans les changements de ton habituels typiques de l'anime, est ce qui reste le plus : on s'enracine volontiers même pour ceux qui devraient être une incarnation du mal, mais méritent une seconde chance au nom d'un monde plus gris que noir ou blanc. La « pureté » de Denj en a fait un protagoniste plutôt solide et captivant.
D'autres éléments s'inscrivent dans la lignée de la production moyenne d'anime : l'élimination plus ou moins progressive d'adversaires de plus en plus forts fait écho au RPG, tandis que les affrontements visionnaires et retentissants, prolongés par un montage ultrasonique, sont désormais à la mode. On apprécie cependant le graphisme des différentes abominations, qui pour petits et grands pourrait rappeler le Pyramid Head de Silent Hill, mais qui reste aussi une imagerie visionnaire-métal (rappelée dans la bande originale de certains combats). Quelques doutes plutôt sur la dimension érotique, qui évite la représentation des tétons sur les seins tout en les évoquant dans les dialogues (?), et fait surgir de nulle part de modestes slips sur une… créature qui présentait sa forme la plus menaçante sans les porter. Un frein à main a soudainement tiré dans une expérience hallucinatoire qui reste néanmoins amusante et excitante… et qui pourrait constituer un bon avant-goût pour ceux qui veulent approfondir la question avec le comic ou la première saison de l'anime, composée de douze épisodes.