Conte de fées et apologue peu parlé sur les enfants victimes de la guerre, l’ARF italien de Simona Cornacchia et Anna Russo joue avec un style captivant et un curieux timing comique. Notre avis.
Dans une nation non précisée envahie par un force dictatoriale (on sent les nazis, mais on les symbolise tous), un nouveau née il perd sa mère et vient élevé par sa chienne Bianca. Il pousse librement dans la nature et il pense que c’est un chiensachant prononcer un seul mot : Arfqui devient inévitablement aussi le nom sous lequel il est identifié et reconnu par ses pairs, puis enfermé comme lui dans un camp de concentration… où l’immédiateté et la simplicité d’Arf seront une force déstabilisatrice bénie.
Anna Russoécrivain très actif, engagé pour les droits de l’enfant et au-delà, a publié le roman « La moustache du dictateur« , sur lequel elle s’appuie désormais pour ce scénario, qu’elle a elle-même porté à l’écran avec celui-ci FRA: franchit la ligne d’arrivée en tandem avec le storyboardeur Simona Cornacchia, qui apporte sa contribution à l’animation italienne depuis vingt ans. Les deux réalisateurs offrent un film en cadeau précieux d’un point de vue narratif et esthétiqueun résultat équilibré et homogène qu’il convient de souligner : il évite certains des pièges de ce type de récit, l’allège des tentations trop didactiques et le projette vers un goût international ce qu’il semble garder à l’esprit.
L’histoire a le mérite de adhérer linguistiquement à son protagoniste: Il y a des dialogues dans Arf, il y a quelques blagues, mais les vraies émotions et les moments forts du récit avancent lignes non verbales. C’est une véritable bouffée d’air frais dans le monde du long métrage d’animation : souvent, même lorsqu’il s’oriente vers des orientations artistiques de la qualité sinon meilleure d’Arf, il s’appuie sur le dialogue pour construire son expérience. Mais Arf ne parle pas, et le monde entier autour de lui s’adapte à cette étrangeté. ET le rythme de la réalisation et du montage s’y adaptemoins syncopé que les productions explicitement destinées aux enfants, et aussi pour cette raison curieux et stimulant pour les adultes qu’ils ne dédaignent pas « habiter » les images et les sons sans hâte, observer et écouter. Arf est un film qui n’explique pas, ça montre juste. Avec une simplicité qui reflète son protagoniste joyeusement sauvage.
Si les dialogues raréfiés ne sont pas gênants, l’image doit impliquer encore plus, et la direction artistique d’Arf stimule et divertit l’œil: formes douces et couleurs saturées pour la nature où Arf vit avec Bianca, rigidité grise en ville et dans le camp de concentration, un contraste qui se reflète également dans la conception des personnages dans leurs mondes respectifs. Il n’y a pas de réalisme, bien au contraire la construction visuelle est symboliquedans le trait comme dans les plans : la perspective est fréquemment niée avec un stylisation fortece qui rappelle leimmédiateté communicative de Bruno Bozzetto (même les petits « explicables »), mais aussi la recherche antiréaliste de la meilleure compétition européenne, comme le Salon de dessin animé De Marcheurs de loups. Bien sûr, on ne parle pas des mêmes budgets, et le travail d’animation du studio indien Digitoons il doit y faire face, mais il se défend avec la bonne précision. En revanche, vu ce qui arrive au Dictateur à cause d’un problème de… image, cet aspect ne pouvait certainement pas être secondaire !
Le résultat de la stimulation visuelle et de l’immédiateté narrative d’Arf est une essence de l’histoire clairement mise au point: le film sort près de Jour du Souvenirmais il est suffisamment universel pour couvrir un violation générale (et malheureusement éternelle) de l’enfanceainsi que plus généralement de sérénitépour tout âge. La chanson originale « Paix« , chanté par Simone Cristicchiincarne ce besoin de sérénité avec la même légèreté poétique que le film.