Habitués à donner des portraits hilarants comme L'Illustre Citoyen ou Surprise Ending, les réalisateurs argentins Gastón Duprat et Mariano Cohn ont présenté au Festival de Rome un portrait de l'Argentin, ou plutôt de Buenos Aires, en seize courts métrages avec le même protagoniste. La critique de Mauro Donzelli.
Tout est né de l'amour pour le cinéma italien, et en particulier pour les portraits humains caustiques dans des épisodes comme Les Monstres, d'un acteur très célèbre en Argentine, Guillermo Francella. On peut le définir comme un Claudio Bisio de ces rôles, actif à la télévision, au théâtre et en général comme comédien ultra-populaire. Au cinéma, on se souvient de lui dans notre région surtout comme le protagoniste du Clan de Pablo Trapero, Lion d'Argent à Venise il y a dix ans. Il a convaincu le couple d'or du cinéma intrigant et satirique de Buenos Aires, Gastón Duprat et Mariano Cohn, intéressés depuis longtemps par la réalisation d'un film en épisodes, de raconter l'histoire d'Homo Sapiens, dans l'original Homo Argentum, un portrait en seize nouvelles, toutes interprétées par Francella avec différents accessoires, sur l'homme argentin d'aujourd'hui, ou plutôt sur l'habitant de Buenos Aires. Aires.
Comme dans notre cinéma des temps dorés, cette satire féroce s'en prend à la bourgeoisie, utilisant la particularité de la capitale argentine de proposer de grandes différences sociales et quelques mètres de distance. La caméléon Francella, sans maquillage épais, souvent juste avec une perruque et des vêtements différents, peut-être un tatouage ou un chapeau particulier, parvient à caractériser un carrousel hilarant de petites choses humaines sans faire de prisonniers. Il s'en prend à tout le monde, avec carte blanche évidemment pour satire de classe. Du président qui ne peut même pas parler à la nation et qui s'en va envoyer tout le monde en enfer, au curé du village qui continue dans un sermon sur la chance que les pauvres ont d'être pauvres, s'adressant aux pauvres qui sont avec lui à table devant un repas chaud, pour ensuite être réprimandé par l'un d'eux qui demande à la hâte s'ils peuvent d'abord manger, ayant faim, et ensuite entendre combien ils sont bénis par Dieu. Il s'agit d'un épisode qui a été ciblé dans son pays natal pour ses références à la figure du pape François – alors encore vivant et en exercice – et au curé du village, dans ces régions considérées comme intouchables et presque sacrées.
Duprat et Cohn ont l'habitude de démolir avec humour les vices et les vertus de notre époque, notamment dans le monde de la culture et du cinéma, il suffit de penser à The Illustrious Citizen, Coppa Volpi à Venise et Surprise Finale, après une importante carrière d'auteurs de formats télévisuels. Les talents ne manquent pas, tout comme la capacité à saisir les contradictions de la société argentine d'aujourd'hui. Ce n'est pas un hasard s'ils ont été inondés de critiques et de polémiques de tous bords, notamment de gauche, devenant ainsi un phénomène de société, le film à voir car il a été au centre des discussions argentines, obtenant un excellent succès public.
Homo Sapiens est suivi avec goût et plaisir, il se fiche du politiquement correct et frappe fort, laissant un goût de vérité qui laisse un mauvais goût en bouche, et l'inconfort dû à l'ambiguïté souvent misérable qui se cache derrière ces personnages. Certainement pas impossible à trouver sous toutes les latitudes, y compris la nôtre, si historiquement liée à l'Argentine par les millions de citoyens originaires de notre pays. Comme le protagoniste du dernier épisode, tourné dans le village de Montalbano Elicona, qui revient plein d'enthousiasme dans sa ville d'origine de la province sicilienne, pour être accueilli d'abord avec chaleur puis de plus en plus cyniquement par ses parents éloignés. A ne pas manquer.