Les ours n’existent pas

Le réalisateur iranien Jafar Panahi, persécuté chez lui pendant des années pour sa vision d’artiste, a réalisé Gli les ours n’existent pas, l’histoire de deux amours en parallèle dans l’Iran d’aujourd’hui en compétition à la Mostra de Venise. L’avis de Mauro Donzelli.

LA les frontièresterritoriales et limitesles techniques, continuer à ne pas freiner l’élan créatif de Jafar Panahi. Des années de contrainte, d’arrestations et d’interdictions de quitter son Iran ne l’empêchent pas de faire appel avec déplacer la créativité artisanale vers la forme d’expression qu’il aime, et nous avec lui : le cinéma. Les ours n’existent pas il s’agit d’une œuvre en tous points clandestine, étant donné qu’une interdiction de filmer lui pesait au moment du tournage, qui devint plus tard une arrestation et une nouvelle condamnation du régime à six ans pour avoir protesté contre la persécution de son collègue, Mohamed Rasoulof (gagnant de l’Ours d’Or pour Le mal n’existe pas).

Il est inévitable de se focaliser sur l’actualité le concernant, en parlant de Panahi, tant il est « obligé » de se remettre en scène à la première personne. Après une première scène de dialogue entre un homme et une femme, il apparaît en réalisateur qui réalise à distance son nouveau film. Ne pouvant quitter le pays, il s’installe dans une petite ville à la frontière avec la Turquie pour se rapprocher du plateau. Il raconte l’histoire d’un couple iranien qui vit juste au-delà des montagnes et attend depuis des années qu’un visa soit délivré pour l’Europe. Mais en prenant une chambre dans la maison d’une famille très hospitalière, il se retrouve impliqué dans un microcosme qui continue encore avec ses propres règles anciennesprovoquant une réaction collective lorsqu’il filme deux amants avec sa caméra.

L’amour et la superstition d’une société qui étouffe la libre expression des femmes et des hommes de tous âges est toujours au centre de cette double histoire où émerge la lente érosion de la rationalité individuelle. Le libre arbitre est écrasé sous le poids des traditions acquises et tenues pour acquises, jamais remises en cause. Bien que tout le monde le sache Les ours n’existent pas. Cela se passe dans le village où le réalisateur est d’abord accueilli avec une grande et cérémonieuse courtoisie, pour ensuite être interrogé parmi les villageois lorsqu’ils enregistrent accidentellement mal avec une caméra. Un accident et le premier caillou du mécanisme de l’hospitalité, une métaphore de l’incapacité à accueillir les nouvelles de la ville, voire tout simplement la fin de la superstition, sinon la modernité d’une caméra à bien utiliser. Entre autres, il suffit de reprendre une cérémonie traditionnelle.

Panahi fait un film avec pauvreté de moyens mais pas de puissance métaphorique, à travers quelques idées simples de mise en scène et de récits, il élargit son regard au-delà de la frontière, met en évidence sa ridicule signification anti-historique, ainsi que celle d’un pouvoir qui existe désormais .. en tant que statut, ayant perdu le sens même de sa fonction sociale. Le réalisateur iranien avec amertume a du mal à proposer une autre solution que l’évasion, le constat d’une folie irrémédiable. Nouveau chapitre sur la portée exemplaire d’une vie au service du cinéma et la dénonciation des distorsions du pouvoir.