Revue de la Patagonie

Un garçon en quête de stimuli et de passions, limité par sa vie en province. Tout d’instinct et de sentiments, Patagonia est le premier film de Simone Bozzelli, présenté en compétition au Festival de Locarno. La critique de Mauro Donzelli.

Une maison de campagne et un jardin. C’est le contexte dans lequel on rencontre Yuri, vingt ans, qui vit avec une tante dans une petite réalité où tout est toujours pareil, qui représente son univers. Pour s’aventurer au-delà d’une colline ou d’une forêt, au cours d’un été, arrive un animateur de fête pour enfants, Agostino, qu’il rencontre par hasard et cela lui donne le courage de se pousser plus loin, ne serait-ce que pour quelques kilomètresune sorte de Charon pour vaincre la timidité et affronter l’inconnu. Une envie de liberté véhiculée par une passion fulgurantemême si la recherche de l’indépendance risque d’entraîner cette dépendance étouffante que peut apporter en cadeau un amour auquel on s’abandonne sans filet, jeune et absolu.

Derrière un voyage d’éducation et de découverte, Patagonie raconte diverses déclinaisons du désir, comme la possession et le pouvoir sur autrui, comme le rêve d’une vie différente et lointaine, comme le rappelle le titreet apporte avec lui une chanson jouée à plusieurs reprises qui chante ses louanges. Simone Bozzelli, débutant avec derrière lui quelques courts métrages appréciés, choisit le 16 mm et une photographie qui met en valeur les couleurs acidulées nocturnes et vives lors des journées chaudes. Une évasion qui construit une nouvelle cage, le camping-car dans lequel elle évolue avec Agostino, qui remplace celui initial de la famille. Mais c’est une cage que Yuri a recherchée et construite pour lui-même, dans le cadre d’un voyage d’exploration de sa propre géographie interne et externe, dans un parcours contrasté mais plein d’une candeur sans compromis, prêt à se mettre totalement en jeu à la recherche d’un ailleurs à partager, qu’il connaît et ne veut rien savoir.

Entre raves et fêtes d’enfants, campeurs porte ouverte et rencontres inattendues, Patagonia construit un imaginaire suspendu entre l’enfance et le voyage chevaleresque médiéval, naïf et pervers, espiègle et plein d’espoir.. Le naïf Yuri et l’égocentrique Agostino se reniflent, dans une histoire de regards et de reconnaissances, où plaisir rime avec douleur, doute de soi et perception des autres. Une apparition dans un réseau de relations adultes et imprévisibles, entre des animaux sans défense et une souffrance généralisée et cachée, celle de ceux qui tentent de prendre la fuite pour vaincre un monde qui ne leur suffit plus, souvent implacables en le qualifiant de marginal et de une sensibilité qui n’est pas adaptée à ce territoire.

Une adolescence jamais pleinement vécue, étouffée par le contexte et par l’absence de ce courage qu’Agostino lui a offert en cadeau, avec les couleurs, les tatouages ​​et la musique de la séduction d’un style de vie différent. Tentation et danger, ce qui fait couler l’adrénaline et le désir au bord du précipice. Ensuite, il y a la Patagonie, toujours droite, jusqu’au matin.