Après une longue absence, Michel Gondry – l’un des grands réalisateurs contemporains – revient au cinéma avec un beau film, qui sous couvert de comédie hilarante cache un acte de réparation et d’abandon douloureux et nécessaire. La critique du Livre des Solutions de Federico Gironi
Maintenant, ce n’est pas que ce soit une prescription obligatoire, mais je pense que pour profiter pleinement et pleinement, encore plus d’une importante vision isolée, Le livre de solutionsc’est utile de voir, avant ou après aussi Michel Gondry Faites-le vous-même Et Au lit avec Michel Gondryles deux documentaires sur le réalisateur réalisés par François Néméta et disponible sur la plateforme de streaming JeMerveilleux (où Les merveilles ne sort ce film qu’ici).
D’abord parce qu’ils sont à la fois très intéressants et complémentaires ; deuxièmement, parce que le résumé de la carrière de Gondry, sa psychologie, ses chutes et ses ascensions, son approche du cinéma et de la créativité qui sont donnés dans les documents sont essentiellement réalisés par le Français lui-même, impitoyablement autobiographique et autodérisiondans ce film.
Dans le Livre de solutions, Michel Gondry devient Marc Becker, évidemment, il est aussi réalisateur.
Un réalisateur qui, face aux producteurs qui veulent lui retirer son nouveau film, s’enfuit dans les Cévennes chez une tante bien-aimée avec son monteur, son assistant et l’AVID qui contient le film monté. Là, dans les bois, ces femmes vont devoir faire face aux crises maniaco-dépressives d’un Marc qui renonce aux psychotropes : avec ses peurs, son égo, son hypersensibilité, ses délires créateurs, ses élans brillants et ses crises de colère et d’insécurité. .
Il n’est pas nécessaire d’avoir vu les documentaires mentionnés ci-dessus pour savoir ou comprendre que dans le Livre des Solutions Gondry parle de lui, et d’une dépression qui l’a éloigné du cinéma pendant de nombreuses années, avant ce retour exemplaire. Un retour dans lequel il se retrouve toute l’idée lo-fi, artisanale, hyper-créative du cinéma qui l’a rendu célèbre et adoré dans le monde entier.
Tu n’as pas besoin d’avoir vu la belle L’épine dans le coeur comprendre ce qu’il dit de sa bien-aimée Tante Suzetteici « doublé » par Françoise Lebrun De La mère et la putec’est vrai et ça vient du plus profond de moi.
Vous n’avez besoin d’aucune connaissance préalable pour comprendre, avec vos yeux et votre cœur, plutôt qu’avec votre tête, que Gondry ici, sous la robe comédie hilarante pleine d’une inventivité incroyable (il suffit de penser à la règle de la deuxième vitesse, au moment de l’orchestre et de l’enregistrement de la bande originale, au camionnage), il fait un acte douloureux et nécessaire de réparation et d’abandon.
Présenter des excuses publiques, d’une manière maladroitement irrésistible, et à sa manière sincèrement émouvante, aux personnes qu’il aime et par qui il est aimé. Parler sans filtres, autres que ceux de sa créativité strictement analogique (non par entêtement, mais parce qu’il ne peut pas faire autrement), de son inadéquation et de son décalage avec le monde, les gens, la société.
Incapable de s’engager pleinement même dans son propre travail (Marc ne veut jamais voir le montage de son film, qu’il ne verra que le soir de la première, plongé de honte dans son fauteuil), Gondry est en quelque sorte inapte à aborder la vie réelle, qu’il réinvente dans ses films selon les coordonnées de son imaginaire inépuisable fondé sur le réemploi et l’artisanat.
D’une manière ou d’une autre, on a donc l’impression que Le livre de solutions est à la réalité de la vie de son auteur, tout comme les bandes vidéo re-tournées par Jack Black et Mos Def dans le brillant et sous-estimé Be Kind Rewind l’étaient aux films originaux qu’elles contenaient autrefois..
Et s’il y a du grotesque, de la caricature, de l’exagération, de la parodie, ce n’est qu’une question de perspective et de créativité. C’est une question de génie, de réinventer un monde qui n’est jamais vraiment séparé du monde réel.
Une idée, dit Marc dans le film, c’est de faire quelque chose que personne n’a jamais fait auparavant. Au bout du Au lit avec Gondry il dit que la créativité n’est malheureusement pas peu stimulée par le déséquilibre, et que pour certaines personnes, c’est la seule manière de fonctionner.
Voici, Gondry est passé maître en cela : maître des idées, maître des réussites et des échecs, du déséquilibre. Mais c’est comme ça qu’il travaille.
Ce n’est pas une coïncidence si le chapitre 1 de son livre de solutions se lit comme suit : « L’échec est une séquence de solutions entrecoupées de problèmes. Le succès est une séquence de problèmes entrecoupés de solutions. ».
Ce qui n’est pas la description d’un processus créatif ou cinématographique. C’est la description de la vie. Le sien, celui de Gondry, ainsi que le nôtre.