Revue du travail

Dans le film d’animation Manodopera, réalisé en stop-motion élégant, le réalisateur français raconte l’histoire des racines italiennes de sa famille. Une histoire d’émigration et de sacrifices. Notre avis.

Travail c’est le voyage d’une vie, pas seulement ça de l’Italie à la Francepour un homme nommé Louis. Il vit à Ughettera au pied de la Mont Viso dans le Piémont, entre la fin du 19e siècle et le début du 20e siècle: avec ses frères, pour la société loin de la chaleur et de la réciprocité du village, il est seul bras. Pour le travail dans le tunnel du Simplon, pour ses jours en tant que soldat dans la guerre italo-turque et dans la Première Guerre mondiale, il accepte son sort, jusqu’à ce qu’il décide que – afin de garantir à lui-même, à ses enfants et à sa bien-aimée Cesira un meilleur – le moment est venu de déménager en France.

Travaildeuxième œuvre du réalisateur français Alain Ughettoauteur il y a une dizaine d’années des divers Jasminest un film d’un légèreté poétique désarmante: une propreté absolue de style, d’intention et d’émotion tient son heure et dix de durée, avec uneanimation en stop motion aussi précis sur le plan technique que nécessaire à l’âme de l’histoire. Le fait que les ancêtres de l’auteur soient représentés avec marionnettes permet à Ughetto d’envelopper des événements très concrets et douloureux dans uneaura de conte de féesmais en regardant le magnifique résultat on s’aperçoit que le but n’est pas d’adoucir le drame et la souffrance. Alain retrouve dans l’animation la force qu’avaient ses grands-parents pour se projeter au-delà de la fatigue, de la maladie, de l’exploitation, grâce à une chaleur ironique et affectueuse : Manodopera est un conte de fées animé en stop-motion parce que – Ughetto semble nous dire – c’était ça mélange de dextérité et de tendre poésie d’avoir permis à Luigi et à toute la famille de se régénérer. L’animation ici n’est pas le détachement, c’est l’inverse contact total avec le matériau traité.

C’est dans tous les sens, parce que Alain Ughetto interagit littéralement avec les marionnettes à l’intérieur des décors : on ne voit que ses mains ou ses pieds, alors qu’il envahit les environnements dans lesquels évoluent les personnages, environnements qui d’ailleurs – dans un véritable coup de génie – dénoncent leur être »faux« . Mais c’est un une fiction si éhontée qu’elle boucle la boucle et devient plus réelle que la réalité: l’auteur sait qu’il a hérité de son grand-père et de son père la prédisposition à travail manuel qui a décidé d’investir dans l’animation. L’entendre parler à la marionnette de sa grand-mère pendant qu’elle reconstitue les événements est quelque chose de plus que de briser le quatrième mur. Ce n’est pas du métalinguisme intellectuel ou provocateur : Ughetto ne voit pas vraiment le quatrième muret recherchez le vérité de ses personnages, ses souvenirs et son histoire (familiale et collective) dans leur représentationqui vit comme un acte d’amour.

Tout cela coule dans Manpower avec un tel naturel pour alimenter un malentendu, l’idée que faire un long métrage comme celui-ci est fondamentalement simple. Pourtant, la tendresse visuelle de ses protagonistes est le résultat de stratification émotionnelle que chaque véritable artiste construit au cours de sa vie, et non dans la simple pré-production d’un film. Le questions sur leurs originesle souhait de se sentir partie d’une traditionle désir d’incarner l’héritage de quelqu’un, pour le représenter avec les moyens qui caractérisent sa propre vie. Dans cette plume apparente, accompagnée de la musique de Nicolas Piovani face à un film d’animation pour la première fois, il y a une telle solidité que le stocker plus amer ils trouvent leur place naturellement sans empoisonner la vision plus que nécessaire : messages contre un clergé profiteurla cruauté de racisme en France envers les Italiens, les décès.
La main-d’œuvre sait toucher le sublime parler de le concret et de le mettre en scène, avec le texture matérielle fascinante du stop-motion, avec la force de ceux qui savent regarder au-delà des héros, pour dénicher quelque chose d’encore plus rock. Un exterminé dignité.