Revue Ninjababy

Après La pire personne du monde de Joachim Trier, une autre comédie intéressante de Norvège met en scène une jeune femme qui cherche son orientation dans la vie. Dans ce cas, acculé par une grossesse inattendue. Revue par Federico Gironi.

En regardant Ninjababy, je me suis souvent retrouvé à penser à La pire personne du monde de Joachim Trier. Les similitudes, en effet, sont évidentes : les deux comédies norvégiennes aux tonalités douces-amères, se déroulant à Oslo, mettant en scène deux jeunes filles fortes et indépendantes, indécises sur tout mais déterminées à surfer sur la vague de la vie avec une légèreté ostentatoire ; deux films capables d’obtenir une visibilité et une reconnaissance internationales : les succès de Cannes et la nomination aux Oscars pour le film du déjà établi Trèves, celui de la meilleure comédie à l’EFA et pour celui du moins connu Yngvild Sve Flikke; à la fois, avant tout, capables de photographier une réalité – féminine et non – qui n’est pas seulement celle d’une Norvège riche, avancée et progressiste, mais plutôt universelle, et de le faire en utilisant au maximum l’imagination et l’invention.
Mais attention : cela veut dire quelque chose sur la vitalité et le regard du cinéma norvégien contemporain, mais ça ne veut pas du tout dire ça bébé ninja est un film subsidiaire à celui de Trèves, une copie ou une refonte de celui-ci. Cela ne signifie pas non plus que le réalisateur Sve Flikke avait la moindre sujétion psychologique à son collègue. Avec tous les points de contact possibles et imaginables, Ninjababy a une personnalité qui n’appartient qu’à elle.

L’intrigue est bien connue : Rakel, 22 ans à la vie volontairement désordonnée et aux horizons flous, se retrouve enceinte, et de plus au sixième mois, donc sans possibilité d’avorter. Le père de l’enfant – un enfant qui lui parle en version animée, manifestation de sa (in)conscience, donnant naissance à des duos mémorables – est un mauvais narcissique, et de plus cette bombe explose juste au moment où Rakel retrouve Mos, avec qui des semaines avant d’avoir passé une nuit de passion torride, et qui du lit et des brumes d’alcool se révèle être un professeur d’aïkido tendre et amusant : un compagnon presque parfait, mais pas le père de l’enfant qu’elle porte dans son ventre.
L’intrigue est connue, les implications aussi : que doit faire Rakel, celle qui n’a pas encore décidé ce qu’elle veut faire d’elle-même et de sa vie, devant la perspective de générer la vie à son tour, et de devenir mère ? Garder le bébé ? Le donner à l’adoption ? Et à qui?

Il va sans dire que bébé ninjaà sa manière, c’est une histoire de passage à l’âge adulte, et qu’au final Rakel comprendra enfin ce qu’elle veut, de la vie et d’un enfant qui, les uns après les autres, lui arracheront ses excuses et ses hypocrisies, la mettant devant ce qu’elle veut vraiment. Vivre, dessiner, faire des bandes dessinées.
Quoi bébé ninja quoi qu’il en soit, et qui s’écarte de ce qui est connu et prévisible, au moins jusqu’à un certain point, est de trouver un style de narration personnel capable d’être un désir de vie chaotique, ambivalent, contradictoire et écrasant à l’image de son protagoniste. Et raconter des histoires et des personnages sans vouloir en gommer les aspérités et les contours, mais plutôt rendre le tout plus « sympa » et reconnaissable justement en vertu de cette volonté de ne pas être conciliant à tout prix.
La même logique consiste à proposer avec audace une résolution de l’intrigue qui tend à questionner et à renverser, non pas comme un diktat idéologique mais comme une solution subjective, valable et reproductible, la vision traditionnelle de la société concernant les attitudes masculines et féminines à l’égard de la grossesse et de la parentalité.
Pourquoi, faut-il le savoir mais rappelez-vous, tout le monde n’est pas fait pour avoir des enfants. Et parce que, s’en souvenir c’est encore mieux, ne pas les vouloir ne rend pas une femme moins femme, ni les vouloir et s’en occuper ne rend pas un homme moins homme.