Trois garçons évoluent dans un été endormi dans l’extrême banlieue romaine dans Un dimanche exterminé, le premier film d’Alain Parroni apprécié dans la section Orizzonti de la Mostra de Venise. La critique de Mauro Donzelli.
Où la campagne pousse jusqu’aux limites de la ville, jusqu’aux maisons d’une banlieue extrême de Rome, de plus en plus grandes et anarchiques. C’est ce territoire sauvage et hybride, celui habité par trois adolescents protagonistes d’un été – et au-delà – fait d’ennui et d’apathie face à un temps qui passe inexorablement et les accompagne jusqu’au seuil de l’âge adulte. Alex est l’aîné, il a 19 ans et va bientôt devenir père car sa petite amie Brenda est enceinte. Kevin est le troisième de ce triangle, impliqué dans le graffiti et lié aux deux autres par l’habitude et par une relation aussi viscérale qu’apparemment informelle, entre des personnes extérieures apparemment très différentes. Un lien jamais explicité, comme cela arrive entre garçons. Tout ce qu’ils font implique les deux autres, alors qu’ils évoluent entre petits boulots et côte, entre incursions dans la ville éternelle et journées entières passées à partager le néant. Un nihilisme de fait, sans en faire un drapeau comme à d’autres époques, mais simplement passer du temps, partager ces lieux et ces rythmes pour former un partenariat qui les unit et les isole du reste de la ville.
Un dimanche sans fintitre qui résume bien la relation entre le temps et l’espace de ce non-lieu géographique et personnel, est le premier long métrage du trentenaire Roman Alain Parroni. Aux frontières d’une ville qui vit de sa relation avec l’histoire et le passé, les trois hommes évoluent dans un contexte dans lequel le maximum d’histoire qui les touche est constitué par la spéculation constructive, par un sentiment d’immobilité qui fait du futur à son meilleur un mirage, alors qu’ils se tiennent sur un pont piétonnier surplombant une route à plusieurs voies, où tout le monde semble se déplacer à une vitesse vertigineuse avec une destination bien précise en tête.
Parroni construit une symphonie de bruits, de sons et de musique, avec un langage formel qui réélabore les langages et les vidéos des réseaux sociaux, avec un rythme d’autant plus rhapsodique, alternant la stase et l’explosion de frénésie, plus leur l’habitat est. Celle d’Alex, Brenda et Kevin est essentiellement une histoire classique, d’amitié, d’amour et de jalousie, avec des noms qui font référence à des rêves d’ailleurs, à des personnages admirés à la télévision par une génération qui les a précédés et ici disparaît complètement. La seule « adulte » est la grand-mère de Brenda, tandis que le temps semble avoir fait table rase de celles qui ont tenté de grandir et de trouver un sens à ces interminables dimanches devant eux.
Les débuts de Parroni ont une énergie disruptive, une vision personnelle de l’histoire et de la narration qui choque et frappe, dépouillant au maximum les dialogues pour faire ressortir les bruits de fond et les corps souvent immobiles comme des statues des trois protagonistes au premier plan. Ils ont peur de grandir, même s’ils ne l’admettent pas, d’affronter des responsabilités et de nouveaux horizons., dans l’espoir de se comporter en tant que parents différemment de la façon dont leurs parents se sont comportés. Une oscillation continue de naturalisme et d’évasion de la réalité, cherchant un sens au désespoir qui étouffe, entre résidus de tendresse infantile et recherche de son rôle social encore inconnu. En fin de compte, tout simplement, l’adolescence. La plus longue et la plus décousue des phases de croissance, jamais vraiment surmontée, mais immédiatement regrettée.