Les belles ambiances et les excellentes performances ne suffisent pas à Never Let Go pour tenir ses promesses intrigantes. La critique de Daniela Catelli.
Au milieu d'une forêt se trouve une grande et belle maison en bois, avec une fente d'où sortent trois très longues cordes : elles sont l'outil de survie, dans un monde post-apocalyptique, d'une mère et de ses deux enfants, nés dans son intérieur. Le bois de la maison est sacré et se maintenir attachés avec la corde, répéter des litanies et des prières et subir des rites de purification, les rend intouchables par le Mal extérieur qui, dit la mère, a exterminé l'humanité. S'il les touchait, s'ils lâchaient la corde, le Mal s'emparerait d'eux et les ferait s'entre-tuer. Les enfants la croient, mais la plus jeune, qui n'a pas les visions de sa mère, commence à douter qu'elle dit la vérité et à être littéralement tentée de couper le cordon et de voir ce qui se passe. Aussi parce qu’un hiver rigoureux est arrivé et que la faim se fait de plus en plus sentir.
Conte de fées noir, traité sur l'isolement, la paranoïa et la notion de famille, dans ses meilleurs moments, Ne jamais lâcher prise peut avoir été écrit par Stephen Kingavec l'amour farouche d'une mère qui va jusqu'à blesser ses petits pour les protéger. Cette cruauté, exprimée dans des scènes qui laissent des traces (les déjeuners à base d'écorces d'arbres, les prières et les histoires terribles de ce qui existe, le sacrifice presque biblique demandé aux enfants) sont précisément celles qui nous faisaient espérer que le film pourrait être un petit chef d'oeuvre. Malheureusement, nous ne sommes pas dans le domaine de La chose de John Carpenter, avec la tension et l'ambiguïté qui, pendant au moins les 45 premières minutes, nous impliquent et nous font espérer, avec nous tous, une évolution cohérente avec ces belles prémisses. De plus, le décor est suggestif, les acteurs (Halle Berry et les très jeunes Percy Daggs IV Et Anthony B. Jenkins) convaincu et convaincant, et on ne peut le nier Alexandre Aja la capacité de valoriser les éléments à sa disposition : sans en faire trop et sans nous distraire du récit, il construit une architecture hostile et cauchemardesque, souvent avec des vues d'en haut, dans laquelle on voit les trois protagonistes engloutis par la nature, dont l'hostilité apparaît presque tangible.
Les premiers doutes naissent cependant des apparitions des personnages zombies peu convaincants, la mère et son mari, que voit la femme (le premier une sorte de démon, le second apparemment normal). Et le scénario de Kévin Coughlin Et Ryan Grassbyécrit pendant l'isolement du Covid (dont les échos sont très présents dans l'histoire) à un moment donné il doit « choisir », abandonner le chemin de l'ambiguïté et tout résoudre dans une fin qui paraît évidente et précipitée et qui enlève le charme du toute l'histoire. Ce que c'est vraiment Ne jamais lâcher prise? Une analyse de la paranoïa et des dynamiques familiales victimes de l'isolement ? Une invitation à découvrir et à affronter le monde réel, aussi mauvais soit-il ? Pourquoi l’album ne peut-il être écouté que lors de la Nouvelle Lune ? Comment les choses se passaient-elles vraiment avant ? Même la métaphore des cordes, un triple cordon ombilical qu'un seul des trois veut couper, jeté là, reste une suggestion vaine. Bref, l'histoire s'effondre sous le poids de ses propres ambitions, pose de nombreuses questions auxquelles elle ne donne pas de réponses logiques (même pas au sein du genre) et en même temps nous laisse déçus et insatisfaits du dénouement final. Dommage, car on espérait vraiment trouver enfin une horreur psychologique mémorable. Avoir une bonne intuition n’est finalement pas difficile, mais il est bien plus difficile de la développer de manière satisfaisante jusqu’au bout.